il doit être trois heures du matin
je cuis du lard, dans une petite poêle
jusqu'au grésillement
j'étale du beurre sur deux tranches de pain
puis du fromage de chèvre et de la tomate
par dessus, deux autres tranches
je mange le tout avec un demi camembert
puis je brûle des molécules
je fume
puis je me demande pourquoi cette femme
ne m'a pas répondu, ni fait un signe
alors que je lui demandais à mi-mot
de me laisser revenir
j'ai encore faim
je décharge dans mes mains
me vide la tête
me tords le cou
j'ai les paupières lourdes
je mange un morceau de sucre
puis je fume, encore
je repense à l'autre nuit
je buvais avec ma plus douloureuse envie
mais aussi la plus lumineuse émanation
nous parlions de tout, de nos corps
le sien, dont elle m'offrit un court instant le poids
me brûle encore
je mange ce qui reste du pain, sec et un peu âpre
j'entends une dispute, dehors
je fume
au lever du jour, lorsque je m'assoupirai
j'aurai peut-être la visite d'un défunt
mais sans doute ne m'apprendra-t-il rien
de nouveau sur la mort.