un moment de douceur



les jambes pliées sur ce minuscule appui de fenêtre
je te sais proche
et la lumière me dit que j'ai raison d'être là

un moment de marche


123nousironsaubois

1-Et là maintenant, voilà. J’ai voulu ce costume, j’ai mis ce costume, j’ai ce costume, quoi ? J’avais parlé d’une sorte de détraqué, qui s’habille en femme. Uniquement pour coucher avec elles. Un costume pour ce moment. Spécifiquement. Un costume de chasse. Un habit de fiction. Hautement sexué. Très excitant. Mais là… Je ne sais plus. C’est moi que ça détraque. Ca m’excite et me détraque. Camisole, armure. Je suis détraqué. J’ai besoin de me recentrer. Oui. Je n’ai pas su danser, rien, que des spasmes, des prémices, et pourtant … de toute évidence, c’est de quelque chose comme ça… J'ai besoin … j’ai besoin d'un mantra. Oui. De quelque chose d'inlassable, qui parlerait de tout ce que j'ai divisé, morcelé, un mantra pour me sauver de tout ce qu'il en découle, coule, sur la saveur des choses, de tout ce que j'ai perdu, de tout ce que j'ai avalé vomi craché goûté léché. Un mantra qui ne rebouche pas qui ne rempli pas qui laisse l'espace intact mais qui l'éclaire comme hier, la bougie sur mon ventre. Un mantra qui actualise ma page, ma perception, mes articulations, mes ambitions, oui, un mantra qui me fasse aimer, voir, porter mon cou, supporter ma tête, gueule, visage, face, recto, délier ma langue, mes mots, lever la jambe, redresser le dos, le sexe, le regard, l'horizon, la perspective de demain, qui noue mes cordes, qui dénoue mon corps, qui mange mes restes, qui perce, disperse, dépèce, remplace, replace, déplace, qui m'ouvre mais me protège, qui largue mes amarres quelque part, nulle part, n’importe où, un mantra qui me réconcilie avec tout ce que je ne suis pas, n'ai pas suivi, n'ai pas été, ne serai pas, qui détourne la nostalgie l'aigreur la maigreur, qui inspire, respire, inspire, expire
2-j ai le droit de (me) dire que c'est un trou du cul, que je l'emmerde bien profond avec son air con, sa moue de je m'y connais c'est formidable, ses mots biens tournés supra poétiques sexués de merde, sa petite coupe de cheveux bien en désordre comme il faut, l'hypocrisie absolue du vrai mensonge virtuel, la fausse cohérence du concept pour alléger la conscience.
3-Je suis fatigué, parce que le rêve que j'a fait m’a réveillé en sursaut vers trois heures du matin, et que je n'ai pas pu me rendormir. Un être immense de plus de trois mètres de haut au visage animal et changeant portait mon cadavre comme on porte une valise, le sexe en guise de poignée. Parfois, dans ses innombrables mutations lui poussaient des cornes ou des bois, parfois sa peau se couvrait d’écailles. Et mon corps cadavre tenu par la queue, tordu dans un arc inversé, se balançait au rythme des pas du géant.

12,13,14

Fuite logique



On voudrait tous être quelqu'un,
Plutôt qu'être (comme) tout le monde.
Ma lâcheté étant plus grande que mon orgueil,
Je préfère n'être personne.

Mais ensuite, devant les regards tournés vers moi,
Qui à ce moment précis attendent que je sois quelqu'un*,
Mon orgueil est toujours plus grand que ma lâcheté,
Et je préfère encore n'être personne.





*et ça traine et insiste, jusqu'à la sensation d'être un étron sec

Le boogie-woogie man

6. L'Un est l'Autre.

Un entre. Il tient un vieux magnétophone à cassettes. Il a encore changé d'apparence. Il porte un costume extravagant, et un maquillage grossier, très noir autour des yeux. Le boogie-woogie man de la scène précédente revient de là où il était sorti, sans lunettes, chemise ouverte et un essuie autour du cou.

Un :            -Ah, alors… Hein? Pas mal, le petit nouveau? non? Vous en avez pensé quoi? J'aime beaucoup personnellement. Boogie-woogie man… La classe.

B-w man :   -Merci.

Un :            -Je lui ai tout appris. Hein? C'est presque moi qui l'ai fait, je pourrais dire. Pas vrai?

B-w man :   -Exact.

Un :            -Il est fantastique. Un grand pouvoir. Mon œuvre. Je l'ai révélé. Hein? Révélé son pouvoir de personnage. Extraordinaire. Et on peut dire que ça décoiffe.

B-w man :   -C'est gentil.

Un :            -Une pure réussite. Pas facile, pourtant. Hein? De sortir tout ça. On a cherché. Mes talents de musicien n'ont pas suffi. Très dur. Mais j'ai découvert ceci. Il montre un vieux magnétophone à cassettes. Un objet hors du commun. Une découverte qui va bouleverser la vie de bien des gens. Cette petite merveille de technologie traînait dans les coulisses, vous vous rendez compte?

Il souffle pour dépoussiérer et  lit sur la face arrière.

                    Magnétophone à ... cassettes. Philips. Hein? Extraordinaire. Ecoutez.

Il le met en marche. on entend une musique, une sorte de vieux boogie-woogie.. Immédiatement, B-w man se met à danser, comme dans la scène précédente. C'est sa danse.

Un :            -C'est pas formidable, ça?

Il coupe.

B-w man :   -C'est bon.

Un :            -Il est à moi. C'est un don. Il y a une fonction de retour en arrière.

Il revient au début de la cassette, et réenclenche le magnéto. Ils se mettent à danser tous les deux, très synchrones. de petits mouvements, puis qui s'amplifient, et qui se terminent avec la musique.

B-w man :   -C'était fort.

Un :            -Cette machine est fantastique.

B-w man :   -Le fait d'être à deux.

Un :            -Elle est à moi, maintenant.

B-w man :   -Ca a amplifié, le fait de faire ça ensemble…

Un :            -Quoi?

B-w man :   -Ça a amplifié l'effet.

Un :            -Ah oui? Bien bien. Continue, c'est très bien. Je te laisse un instant, tu veux? Je vais continuer ma fabuleuse  exploration. Il sort. Il y a tant de choses qu'on ignore, dans les coulisses, hein? Tant de choses perdues, ... à l'abandon de ... nos mémoires, dans ... les ... coulisses...

Un temps.

B-w man :   -J'espère qu'elle n'en est pas morte.

(sans doute, pourtant)